INFLUENCES INVISIBLES DU PEUPLE PENSANT
CHAPITRE I : L’ESPRIT ET LE CORPS
CHAPITRE II : PLACEBO
CHAPITRE III : MÉTÉOROLOGIE
CHAPITRE IV : ZONE DE RECOUVREMENT
CHAPITRE V : PSYCHOSOMATISME COLLECTIF
CHAPITRE VI : VULGARISATION DANS L’ÉTHER
CHAPITRE VII : PHÉNOMÉNOLOGIE COLLECTIVE
CHAPITRE VIII : APPLICATIONS ET DÉRIVES
CHAPITRE IX : VERS UNE SCIENCE DE L’INVISIBLE
CHAPITRE I : L’ESPRIT ET LE CORPS
Que l’esprit influence le corps, nul aujourd’hui ne saurait le contester sans tomber dans l’ignorance crasse. L’illustre Franz Anton Mesmer (1734–1815) l’avait pressenti et les récentes observations sur les patient·e·s hypnotisé·e·s le confirment : des taches peuvent apparaître sur la peau sous simple suggestion. Il en va de même pour les douleurs dissipées par des substances inertes ou les accès de fièvre calmés par une prière.
Depuis les premières expériences magnétiques jusqu’aux protocoles modernes d’hypnose et de suggestion dirigée, l’on assiste à une lente, mais irréversible, redécouverte de la puissance mentale. Les cas documentés de rémissions spontanées, où des patient·e·s parviennent à vaincre un cancer par la seule force de leur conviction, défient toute explication purement physiologique. Il ne s’agit point ici de miracles, mais bien d’un dialogue mystérieux entre la psyché et les sécrétions chimiques du corps.
À l’inverse, combien de personnes rongées par l’angoisse ou la terreur voient apparaître des troubles bien concrets : éruptions, douleurs, épuisements, nausées… Les maux de l’âme prennent corps. Les symptômes sont mesurables, les examens cliniques les enregistrent, et pourtant ils n’ont pas d’origine extérieure.
CHAPITRE II : PLACEBO
Il est un phénomène que la médecine contemporaine nomme «effet placebo» — une action réelle sur le corps, produite par une substance sans effet pharmacologique propre. Ce qui soigne alors, ce n’est pas la molécule, mais l’attente de guérison, la confiance envers celui qui soigne, et la force invisible du croire.
Le terme «placebo» remonte au latin placere, «plaire». Il apparaît dès le XIVᵉ siècle dans le verset ouvre l’antienne des vêpres des défunts (Office of the Dead) : «Placebo Domino in regione vivorum» signifie «Je plairai au Seigneur dans la région des vivants », avant d’entrer dans le lexique médical au XVIIIᵉ siècle. On appelait alors placebo un remède administré non pour ses propriétés chimiques, mais pour «faire plaisir», comme le note un dictionnaire médical anglais de 1811 : «tout médicament plus destiné à plaire qu’à réellement bénéficier au patient».
Mais c’est au XXᵉ siècle que ce phénomène prend toute sa portée clinique. En 1955, le médecin américain Henry K. Beecher (1904–1976) publie un article retentissant intitulé «The Powerful Placebo», dans lequel il affirme, sur la base d’études de guerre et d’essais cliniques, que jusqu’à un tiers des patient·e·s peuvent voir leurs symptômes soulagés par des traitements dénués de substance active. Il démontre que l’acte thérapeutique, même fictif, déclenche des mécanismes réels dans l’organisme, notamment via la libération d’endorphines.
Ce que révèle l’effet placebo est une chose vertigineuse : l’esprit n’est pas simplement un spectateur du soin, mais l’un de ses moteurs. Et ce lien mystérieux entre croyance et chair ouvre peut-être la porte à des phénomènes plus vastes encore — notamment, lorsque ces croyances ne sont plus individuelles, mais collectives…
CHAPITRE III : MÉTÉOROLOGIE
La météorologie n’est point un caprice des cieux, mais l’expression ordonnée — quoique chaotique en apparence — de forces physiques universelles. Elle résulte des tensions entre énergie solaire, dynamique atmosphérique, rotation terrestre et masses d’eau.
Gaspard-Gustave de Coriolis (1792–1843) démontre que la rotation de la Terre imprime une torsion aux flux aériens, donnant naissance à cyclones et anticyclones. Les fronts atmosphériques naissent des contrastes thermiques. Les courants-jets, découverts par Wasaburo Ooishi (1874–1950), pilotent les grandes structures du climat. Les océans, notamment via le Gulf Stream observé dès le XVIIIᵉ siècle par Benjamin Franklin (1706–1790), jouent un rôle central.
Vilhelm Bjerknes (1862–1951) formalise les lois fondamentales de la météorologie moderne. Mais dans les années 1960, Edward Lorenz (1917–2008) découvre la sensibilité extrême des systèmes atmosphériques aux conditions initiales : une minuscule variation peut engendrer des résultats massifs. C’est, d’ailleurs, la naissance de la théorie du chaos.
Rien, dans ces équations, n’accorde de place à l’esprit humain. Et pourtant, l’humanité, depuis toujours, danse pour la pluie, prie pour le soleil. Ce geste ancestral interroge : y a-t-il un lien, même ténu, entre le climat et la conscience collective ?
CHAPITRE IV : ZONE DE RECOUVREMENT
Il est un espace intermédiaire entre les données du corps et celles du ciel. Une zone floue, fertile, où l’esprit, bien qu’indirectement, pourrait jouer un rôle d’influence. Si l’esprit peut altérer les états du corps, pourquoi limiter son action à l’enveloppe charnelle ?
Les bénédictions qui assainissent les sources, les messes qui calment les tempêtes, les jeûnes collectifs suivis d’accalmies climatiques sont-ils pur folklore ? Seraient-ils les signes d’un lien plus vaste et plus subtil, entre esprit collectif et matière ?
CHAPITRE V : PSYCHOSOMATISME COLLECTIF
Je nomme «psychosomatisme collectif» ce phénomène où un groupe humain, par la puissance de ses affects conjoints, génère un champ d’influence qui agit non seulement sur les corps mais sur l’environnement lui-même.
Lorsque des foules prient, paniquent ou vibrent à l’unisson, principalement inconsciemment à ce jour, elles créent une résonance affective qui modifie l’atmosphère. Il ne s’agit pas de magie, mais d’un écho élargi de l’effet placebo : une somatisation, non plus individuelle, mais collective.
Ce n’est pas un phénomène métaphysique, mais une incarnation cumulative de l’intention mentale, ou un fantasme métaquantique (1). Le corps peut se guérir par la croyance ; le monde, peut-être, peut se troubler ou s’éclaircir par l’alignement invisible d’une multitude.
CHAPITRE VI : VULGARISATION DANS L’ETHER
L’individu isolé éclaire comme une lampe ; la foule, elle, gronde comme un orage. Lorsqu’une émotion saisit un peuple entier — ferveur, peur, joie — l’air semble se charger d’une intensité nouvelle, presque palpable. Certains témoins affirment avoir ressenti un refroidissement brutal de l’atmosphère au cœur d’une panique collective. Ce que d’aucuns expliquent par un simple courant d’air, je l’interprète autrement : l’éther (3) — ce médium subtil entre l’esprit et la matière — réagit.
Il n’est pas rare que certains faits divers — rixes inexpliquées, disparitions énigmatiques, épidémies émotionnelles — se concentrent dans des lieux à forte densité mentale. Ce n’est pas tant le hasard que la saturation d’un champ invisible, que je nomme ici l’éther condensé : un milieu devenu instable, porteur d’ondes de tension, d’anxiété ou de contagion affective.
Là où les affects s’accumulent sans issue, l’éther se trouble, se densifie, jusqu’à devenir lui-même vecteur de violence ou d’euphorie, comme si les émotions humaines, agrégées, parvenaient à infléchir les propriétés mêmes de l’air que nous respirons.
CHAPITRE VII : PHÉNOMÉNOLOGIE COLLECTIVE
Un récit ancien me revient souvent. Autour d’une statue mariale, dans une localité restée anonyme, des fidèles se réunissaient chaque matin pour chanter l’Ave Maria à l’unisson. Huit jours durant, au moment précis du chœur, la pluie tombait. Le neuvième jour, sans chant, le ciel resta parfaitement dégagé.
Les moines parlèrent d’un miracle. Moi, j’y vois peut-être l’émergence d’un phénomène plus subtil : une forme d’hallucination atmosphérique collective, ou plutôt — pour le nommer pleinement — la manifestation d’un égrégore (2) météorologique : un nuage issu de la pensée groupale, de l’unisson psychique, de la ferveur partagée.
Ce type de phénomène n’est pas isolé. À travers les cultures et les âges, l’humanité a sans cesse associé les prières, les chants et les danses collectives à des bouleversements climatiques. Ces récits se retrouvent partout, et dessinent un motif universel.
Dans les villages du sud des Balkans, le rituel de «Dodola» mobilise encore des jeunes filles vêtues de feuillage qui chantent pour faire tomber la pluie (réf. «Dodola and Perperuna»). En Turquie, lors de la «yağmur duası», la prière pour la pluie rassemble les communautés rurales dans des rites collectifs où l’invocation précède parfois des épisodes de pluie inespérée (réf. Daily Sabah, «Turkish Post-Summer Ritual: Rain Prayers, Lore and More», 2022).
Au Japon, les enfants accrochent des poupées «teru teru bōzu» aux fenêtres en chantant pour faire venir le beau temps — une tradition ancrée dans le folklore, mais prise très au sérieux lors de cérémonies scolaires ou agricoles (réf. «Teru Teru Bōzu and the Culture of Weather Prayer», 2020).
Chez les «Basotho» d’Afrique australe, les «prayers for rain» sont des cérémonies rituelles communautaires qui associent chant, sacrifice et ascension en montagne pour «réactiver» le lien avec les ancêtres censés gouverner la pluie (réf. «T.S. Letšosa, Basotho Culture and the Prayers for Rain», 2018).
Au Népal, les rituels «Barsha Mangal» («l’appel de la pluie») relèvent d’une liturgie écologique : les chants de groupe sont censés réaligner la communauté avec les esprits de la nature pour rétablir l’équilibre hydrique (réf. The Wonder Nepal, «The Ancient Nepalese Ritual of Calling the Rain», 2023).
Chez les «Wixárika» du Mexique (souvent appelés Huichol), les prières et offrandes collectives se déroulent en période sèche. L’apparition de pluie peu après les cérémonies a été signalée à plusieurs reprises par des journalistes et ethnologues (réf. El País, «Amidst a Heat Wave, Mexico’s Wixárika People Invoke the Rain», 2023).
Ces exemples ne constituent pas des preuves au sens expérimental, mais ils dessinent une structure profonde, persistante, partagée. Une constante anthropologique que la modernité a refoulée : l’idée qu’une volonté collective — lorsqu’elle est incarnée par le rituel, la voix ou la ferveur — puisse résonner au point d’infléchir les phénomènes du ciel.
Certes, les scientifiques parlent majoritairement de hasard, de biais cognitifs ou d’interprétation sélective. Mais à force d’accumuler les coïncidences, les récits, les correspondances géographiques et culturelles, il devient légitime de poser la question suivante : l’esprit groupal, lorsqu’il atteint une masse critique d’intensité émotionnelle, ne déclenche-t-il pas un champ d’influence capable de troubler l’ordre sensible ?
Ce n’est pas une causalité mécanique, mais une résonance symbolique. Ce trouble dans l’éther. Une vibration mentale qui, à défaut de déplacer les nuages, semble parfois les faire répondre.
Je n’accumule pas ces récits comme on collectionne des légendes, mais comme on recueille les indices d’un territoire en formation — une cartographie inachevée de phénomènes encore insaisissables. À force de converger, ces faits dessinent les contours d’une hypothèse, non plus poétique mais scientifique.
Peut-être s’agit-il d’une théorie dont l’écho nous parvient en sens inverse, venue du futur, comme un souvenir non encore formulé. Peut-être découvrira-t-on, dans ces manifestations collectives, la trace d’un outil intérieur — organique, biologique — aussi puissant que les intelligences artificielles que nous déléguons à nos machines. Non pas une technologie externe, mais une faculté enfouie du vivant pensant. Un pouvoir oublié de notre atmosphère mentale.
CHAPITRE VIII : APPLICATIONS ET DÉRIVES
Si ce champ existe – si la psyché collective peut influencer l’équilibre physique du monde – alors il ne restera pas longtemps ignoré. Toute force latente finit par être exploitée, récupérée ou militarisée. Plus cette force est invisible, émotionnelle, non traçable, plus elle est convoitée.
À l’heure où les technologies de modification du climat ne relèvent plus de la science-fiction, certains signes montrent que la manipulation atmosphérique est déjà en marche. Les pratiques de cloud seeding – stimulation artificielle des pluies par ensemencement des nuages – sont désormais régulières dans des pays comme la Chine, les États-Unis ou les Émirats arabes unis. En avril 2024, une série d’inondations dévastatrices a touché le Golfe, notamment Dubaï, provoquant des dégâts sans précédent. Si la plupart des experts ont attribué ces événements à une tempête convective naturelle d’une ampleur exceptionnelle, d’autres y ont vu la conséquence d’un déséquilibre provoqué par des interventions humaines sur le ciel.
Ces technologies, même si elles n’ont pas provoqué directement la catastrophe, montrent déjà l’existence d’un imaginaire politique et stratégique du climat. La possibilité d’un ciel programmable, même partiellement, modifie le rapport de force géopolitique et psychique. Qui contrôle l’ambiance, contrôle déjà les corps.
Dans ce contexte, une hypothèse comme celle du champ éthérique collectif – ou psychosomatisme atmosphérique – devient tout sauf anodine. Si des dispositifs mentaux, émotionnels, narratifs, pouvaient orienter localement la qualité de l’air, la pression, ou l’état vibratoire d’un espace, alors la conscience elle-même deviendrait technologie. Non plus via des machines, mais via des êtres.
Ce potentiel pose une double question : à qui profitera-t-il et dans quelle direction sera-t-il cultivé ? L’esprit groupal peut être mobilisé pour créer la cohésion, la paix intérieure, la résonance affective dans les communautés. Mais il peut tout aussi bien être instrumentalisé pour induire la peur, l’adhésion, ou l’effondrement moral. Ce champ – s’il est réel – ne fait pas de morale : il amplifie ce qu’on y projette.
Reste alors à imaginer une science éthique de la modulation collective. Des environnements conçus non pour dominer, mais pour soigner. Des lieux d’apaisement atmosphérique, où la cohérence intérieure des groupes humains stabilise les tensions extérieures. Des protocoles non pas de contrôle, mais de régulation volontaire des affects partagés.
Cette science-là ne serait pas faite de câbles, de capteurs et de satellites. Elle serait faite de chair, de récits, de rythmes communs et d’élans alignés. Une technologie intérieure, organique, capable d’agir à l’échelle du vivant pensant. Son efficacité reposerait sur la rigueur, la mémoire, et une vigilance éthique absolue.
Ce qui est en jeu, ce n’est pas seulement une hypothèse poétique. C’est la possibilité d’un tournant. D’un passage de l’ingénierie extérieure à une ingénierie intérieure. De la domination de la matière à l’accord des présences.
Si ce pouvoir existe, il faudra en répondre. Car ce que nous serons capables d’en faire dira beaucoup plus de nous que son existence elle-même.
CHAPITRE IX : VERS UNE SCIENCE DE L’INVISIBLE
Ce texte n’est pas vraiment une conclusion, mais plutôt une invitation. Une mise en tension. Un seuil pour celles et ceux qui pressentent que le climat du monde ne se joue pas seulement dans les nuages, mais aussi dans les esprits alignés, les affects croisés, les récits partagés.
Le baromètre ne suffit plus. Il faut désormais écouter l’égrégore. Non comme une croyance, mais comme une hypothèse exigeante. Non comme une superstition, mais comme une science en devenir.
Car si le psychosomatisme collectif peut influer sur l’atmosphère — même faiblement, même localement — alors ses applications dépassent de loin la météorologie. Il devient un outil potentiel pour penser les systèmes vivants dans leur ensemble.
Dans l’écologie, il ouvre la voie à une lecture affective des écosystèmes : comment l’état émotionnel collectif d’un territoire influence-t-il la résilience de ses forêts, la qualité de son air, la fertilité de ses sols ?
Dans la santé publique, il interroge la porosité entre stress social et épidémiologie, entre climat mental et immunité collective. Peut-on prévenir des maladies en stabilisant les champs affectifs d’un quartier, d’un hôpital, d’une ville, … ?
Dans l’urbanisme, il invite à concevoir des espaces non seulement fonctionnels, mais harmoniques : architectures d’apaisement, places respirantes, lieux de synchronisation émotionnelle.
Dans la politique, il questionne le climat des débats, des manipulations d’états, les vagues d’adhésion ou de rejet, non comme simples opinions, mais comme phénomènes atmosphériques du lien social.
Dans l’art vivant, il devient support d’expériences partagées, de performances invisibles : comment créer des formes qui modifient réellement la texture d’un lieu par la concentration d’une audience ?
Dans la mémoire collective, il éclaire les lieux chargés, les silences persistants, les atmosphères historiques que l’on ressent sans pouvoir les expliquer. Ce sont là des épicentres d’égrégores, des plaques sensibles de l’inconscient commun.
Le psychosomatisme collectif ne propose pas une vérité. Il propose un champ des possibles. Il demande du temps, des protocoles, des croisements, des résistances. Il réclame aussi une éthique du regard, une bienveillance et une attention de chaque instant. Il ne prétend pas remplacer les sciences établies. Il cherche à les prolonger là où la subjectivité devient un facteur mesurable.
Le reste viendra par contamination lente. Car si ce champ existe comme j’aime le croire, il nous précède peut-être. Il nous traverse déjà. Et il attend, silencieux, que nous apprenions à l’écouter, à le décrire, à le rendre opérant — non pour le dominer, mais pour coexister avec lui.
Cetusss, Genève le 26/7/25
(1) métaquantique adj. et n. f.
(du préfixe méta-, «au-delà de», et quantique, «relatif à la physique des particules»)
- Adj. Se dit de ce qui dépasse ou englobe les cadres explicites de la physique quantique, en intégrant des dimensions non mesurables telles que la conscience, l’intention, ou les interactions mentales supposées entre l’observateur et le réel.
Ex. : hypothèse métaquantique, influence métaquantique du collectif humain. - N. f. Discipline spéculative ou conceptuelle postulant l’existence de niveaux d’interaction entre l’esprit et la matière situés au-delà des modèles actuels de la mécanique quantique, notamment par l’intermédiaire de champs informationnels, symboliques ou émotionnels.
Ex. : La métaquantique explore les résonances entre la psyché humaine et les fluctuations invisibles du réel.
(2) égrégore n. m.
(du grec ancien ἐγρήγορος,égrêgoros, «éveillé, vigilant»)
- Esprit collectif autonome, généré par la convergence mentale, émotionnelle ou symbolique d’un groupe d’individus unis par un même but, une même croyance ou une même tension affective.
Ex. : Un égrégore peut naître d’une foule en prière, d’un mouvement politique, ou même d’un rituel artistique intense. - Forme pensée persistante, dotée d’une existence symbolique propre, alimentée par l’attention, la mémoire et l’énergie d’un collectif.
Ex. : Certains égrégores peuvent survivre à la disparition du groupe qui les a engendrés, comme des entités de mémoire active. - Concept ésotérique (occultisme, mysticisme) : entité psychique autonome formée par la somme des pensées et émotions des membres d’un cercle magique, d’un culte ou d’une tradition initiatique.
(Ex. : usage chez Eliphas Lévi, Papus, les Rose-Croix, ou certaines écoles gnostiques contemporaines)
(3) éther n. m.
(du grec ancien αἰθήρ, aithēr, «air pur», «ciel supérieur»)
- Produit chimique volatil et inflammable, utilisé en pharmacie comme solvant et, historiquement, comme anesthésique. Aussi appelé éther éthylique ou éther sulfurique, il agit par inhalation en provoquant une perte de conscience temporaire.
Ex. : Jusqu’au milieu du XXᵉ siècle, l’éther fut largement utilisé en chirurgie comme agent anesthésique. - Milieu subtil et invisible, longtemps supposé remplir l’espace et servir de support à la lumière ou aux forces cosmiques. Dans les cosmologies antiques et la physique classique jusqu’au début du XXᵉ siècle, l’éther était considéré comme la substance fondamentale traversant l’univers.
Ex. : Jusqu’à Einstein, la lumière était pensée comme une vibration transmise par l’éther luminifère. - Substrat immatériel situé entre l’esprit et la matière, agissant comme médium des forces vitales, des intentions ou des champs symboliques. Dans de nombreuses traditions ésotériques, l’éther est un fluide vibratoire liant les plans visibles et invisibles.
Ex. : Dans l’ésotérisme occidental, l’éther sert de passerelle entre le corps physique et les plans subtils. - Champ affectif ou psychique collectif, conceptualisé de manière spéculative comme un espace sensible aux émotions humaines agrégées. En littérature spéculative et poétique, il devient la métaphore d’un climat mental partagé, réactif à la conscience groupale.
Ex. : L’éther condensé d’une foule paniquée pourrait, selon certaines hypothèses, altérer localement l’atmosphère.